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Burundi : la democratie et la paix en danger

Depuis l’arrivée au pouvoir en septembre 2005 du nouveau gouvernement démocratiquement élu, le premier depuis 1993, le climat politique au Burundi s’est considérablement dégradé. Dirigé par le Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces pour la défense de la démocratie (CNDD-FDD), le gouvernement arrête ceux qui le critiquent, s’efforce de museler la presse, commet des abus contre les droits de l’Homme et a renforcé son contrôle sur l’économie.

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Synthèse

Depuis l’arrivée au pouvoir en septembre 2005 du nouveau gouvernement démocratiquement élu, le premier depuis 1993, le climat politique au Burundi s’est considérablement dégradé. Dirigé par le Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces pour la défense de la démocratie (CNDD-FDD), le gouvernement arrête ceux qui le critiquent, s’efforce de museler la presse, commet des abus contre les droits de l’Homme et a renforcé son contrôle sur l’économie. S’il continue sur cette lancée autoritaire, il risque de déclencher des troubles violents et de perdre les acquis du processus de paix. La communauté internationale doit surveiller l’action du gouvernement et l’encourager à adopter une approche plus inclusive et doit poursuivre son engagement dans le pays après le départ des troupes de l’ONU prévu pour décembre 2006.

L’arrestation de membres influents de l’opposition en juillet 2006, accusés d’un improbable coup d’État qui se préparait, a été l’événement le plus troublant. La confession de certains détenus aurait été arrachée sous la torture. Mais ceci n’est qu’un exemple, malheureusement frappant, de la détérioration des droits humains et du pluralisme politique au Burundi. Peu après son entrée en fonction, le gouvernement a lancé des opérations militaires contre le dernier groupe rebelle en action, le Palipehutu-FNL, dans le cadre desquelles il a emprisonné, torturé et même exécuté de nombreuses personnes soupçonnées d’être des combattants ainsi que des civils accusés de comploter avec les rebelles, souvent avec l’aide du Service national de renseignement.

Le parti au pouvoir intervient régulièrement dans l’attribution des marchés publics et l’on craint qu’il se serve de sa position au sein de l’État pour alimenter sa propre trésorerie. Des changements importants parmi le personnel d’entreprises publiques rentables ont provoqué la rancœur de certains hommes d’affaires, qui pourraient être tentés de réagir en finançant des dissidents politiques. L’Union européenne et la Banque mondiale craignent de voir la corruption croître au sein du gouvernement ; la Banque mondiale a d’ailleurs suspendu une partie de son aide budgétaire en attendant un audit. 

Cette dérive autoritaire du gouvernement a été exacerbée par la faiblesse des institutions censées servir de contre-pouvoir face à l’exécutif. L’opposition politique est divisée et le CNDD-FDD contrôle aussi bien le Parlement que les tribunaux. Il réprime les critiques au sein de la presse et de la société civile. Bien que le gouvernement ait récemment tenté de dialoguer avec les journalistes et la société civile, il est fort improbable qu’il réussisse à apaiser les tensions tant qu’il maintiendra en détention un certain nombre de responsables d’ONG pour des motifs peu convaincants.

Jusqu’à présent, il n’y pas vraiment eu de signes d’une opposition violente. L’intégration des forces de sécurité a affaibli l’ancien establishment militaire tutsi, qui hésite à agir par peur d’une réaction violente contre la communauté tutsie. Toutefois, la récente action gouvernementale a endommagé le tissu politique du pays et pourrait provoquer des troubles dans un avenir proche. Son comportement pourrait également gêner la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu signé avec les rebelles du FNL le 7 septembre 2006.

L’autoritarisme croissant au Burundi est inquiétant après le début prometteur du processus de paix. Lorsque le gouvernement est arrivé au pouvoir, il bénéficiait d’une bienveillance considérable aussi bien au niveau national qu’international, qu’il pourrait bien perdre s’il ne fait rien pour promouvoir une gouvernance démocratique responsable et un dialogue plus large avec différents acteurs burundais. C’est d’abord au gouvernement burundais qu’il revient de prendre ses responsabilités mais la communauté internationale, et en particulier les donateurs et la nouvelle Commission de consolidation de la paix des Nations unies, ont également un rôle important à jouer.

Nairobi/Bruxelles, 30 novembre 2006

Executive Summary

Since the new, democratically elected government came to power in September 2005, the first since 1993, there has been marked deterioration in Burundi’s political climate. Led by the National Council for the Defense of Democracy-Forces for the Defense of Democracy (CNDD-FDD), the government has arrested critics, moved to muzzle the press, committed human rights abuses and tightened its control over the economy. Unless it reverses this authoritarian course, it risks triggering violent unrest and losing the gains of the peace process. The international community needs to monitor the government’s performance, encouraging it to adopt a more inclusive approach and remain engaged even after UN troops depart in December 2006.

The arrest of prominent opposition politicians in July 2006, accompanied by questionable claims that a coup was being planned, has been the most disturbing development. Some of those arrested were tortured into signing confessions. But this was only one, albeit high-profile, example of the deterioration in human rights and political pluralism. Soon after its inauguration, the government launched military operations against the last remaining rebel group, the Palipehutu-FNL, in the course of which it imprisoned, tortured and even executed many suspected combatants as well as civilians accused of colluding with the rebels, often with the National Intelligence Service (SNR) behind the abuses.

The ruling party is also actively interfering in public procurement, fuelling suspicions that it is using state offices to fill its coffers. Sweeping personnel changes in lucrative state companies have caused resentment amongst businessmen, who may be tempted to respond by financing political dissidents. The European Union and the World Bank have both expressed concern at increasing government corruption, and the latter has suspended part of its budgetary aid pending an audit.

The authoritarian drift has been exacerbated by the weakness of institutions meant to provide a check on the executive. Political opposition is divided, and the CNDD-FDD controls both parliament and the courts. It has clamped down on critics in the press and civil society. Although the government has recently attempted to establish a dialogue with journalists and civil society, its prospects of reducing tensions are poor as long as several NGO leaders remain in custody on tenuous grounds.

There are few signs of violent opposition as yet. Integration of the security forces has weakened the former Tutsi military establishment, which is reluctant to act for fear of a backlash against its ethnic community. However, the government’s recent actions have damaged the country’s political fabric and could foster unrest in the near future. Its behaviour could also hamper implementation of the ceasefire agreement signed with the FNL rebels on 7 September 2006.

The growing authoritarianism is disturbing after such a promising beginning to the peace process. The government came to power with considerable domestic and international goodwill, which it will lose if it does not take steps to promote accountable, inclusive and democratic governance. The primary responsibility is the government’s, but the international community, particularly donors and the UN’s new Peacebuilding Commission, have important support roles to play in this respect.

Nairobi/Brussels, 30 November 2006

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