Briefing / Africa 4 minutes

Un plan d'action pour le Congo

Plus de deux ans de transition en République démocratique du Congo et le processus de paix est toujours en danger. Chaque jour, on compte encore jusqu’à 1000 décès des suites directes ou indirectes de la guerre : maladies, malnutrition et insécurité.

Résumé

Plus de deux ans de transition en République Démocratique du Congo et le processus de paix est toujours en danger. Chaque jour, on compte encore jusqu'à 1000 décès des suites directes ou indirectes de la guerre - maladies, malnutrition et insécurité. Bien que les principaux dirigeants des belligérants soient inclus dans le Gouvernement de transition, leur corruption et mauvaise gestion menacent le bon déroulement et la stabilité des prochaines élections nationales - désormais reportées de juin 2005 à mars 2006. Il faut que la communauté internationale maintienne sa pression sur plusieurs fronts en exigeant des réformes spécifiques dans les secteurs de la sécurité et de la justice de transition ainsi que de la bonne gouvernance comme préalables à la tenue des élections sans attendre la mise en place d'un nouveau gouvernement.

L'Accord global et inclusif de 2002, qui a crée l'actuel gouvernement de transition composé des principaux belligérants congolais, engage celui-ci dans un plan de réunification nationale, de désarmement et d'intégration des groupes armés ainsi qu'à la tenue d'élections. Quelques progrès ont été réalisés. Le Parlement a adopté un projet de Constitution (soumis à un référendum incertain en novembre) ainsi que des lois sur la nationalité, l'armée nationale et les partis politiques. Les anciens belligérants ont commencé à fusionner leurs structures administratives et leurs divers groupes armés. Cependant, le processus de réforme du secteur de la sécurité, du système judiciaire et de l'administration locale est loin d'être achevé.

Les atermoiements des anciens belligérants peu désireux de renoncer à leurs pouvoirs et à leurs biens dans l'intérêt national sont la principale raison de l'impasse et du report des élections. Ils ont tous maintenu des structures parallèles de commandement au sein de l'armée, de l'administration locale et des services de renseignements. Des détournements de fonds considérables ont entraîné le paiement inadéquat et irrégulier des fonctionnaires et des soldats, de sorte que l'État est peut-être devenu la plus grande menace à la sécurité du peuple congolais.

Cette faiblesse du Gouvernement encourage aussi les groupes armés de l'est du pays à continuer de maltraiter les civils. Le groupe des insurgés Hutus rwandais, le FDLR, a refusé d'honorer sa promesse de mars 2005 l'engageant à un retour pacifique et continue de se rendre coupable de certains massacres.  Dans le Nord Katanga, les groupes Mai-Mai se sont battus tant entre eux que contre l'armée congolaise, entraînant le déplacement de plus de 280.000 habitants au sein de la province. En Ituri malgré des interventions vigoureuses de la Mission de l'Organisation de Nations Unies en République Démocratique du Congo (MONUC), 4.000 à 5.000 combattants attaquent encore régulièrement la population locale, les troupes internationales ainsi que les agents humanitaires.

L'année prochaine sera décisive pour le Congo, un des pays les plus vastes et potentiellement riches de l'Afrique. La réussite de la transition est loin d'être garantie. Malheureusement, il est probable que les dirigeants politiques persisteront à bloquer les réformes cruciales de la transition et tenteront de détourner les élections en leur faveur. Il y a de sérieuses raisons de redouter des manipulations électorales et même la reprise de la violence à grande échelle mettant en péril tant l'unité du Congo que la stabilité d'une grande partie du continent.

Pour écarter ces dangers, le Conseil de sécurité de l'ONU et les autres membres influents de la communauté internationale doivent faire pression sur le Gouvernement de transition. Il doit prendre des mesures globales afin de mettre fin aux souffrances du peuple congolais et d'assurer la réussite de la transition d'ici juin 2006. Ce rapport expose un plan d'action complet articulé autour de cinq objectifs cruciaux incluant les éléments clés suivants:

  • Un: Des élections libres et justes. Le Parlement doit adopter les lois électorales clés; le Président Kabila doit tenir sa promesse de nommer de nouveaux administrateurs locaux reflétant l'esprit de l'Accord de partage du pouvoir signé à Pretoria en 2002; la communauté internationale doit mettre en place un système efficace d'observation des élections prévues pour mars 2006.
     
  • Deux: La bonne gouvernance et la justice. Un mécanisme conjoint doit être mis en place par les Congolais et les bailleurs de fonds, pour venir à bout de la corruption au sein de l'État; l'aide des bailleurs de fonds doit être conditionnée à des progrès précis en matière de bonne gouvernance et de renforcement des institutions congolaises -- particulièrement les commissions judiciaires et parlementaires; une chambre spécialisée en droits de l'homme doit être créée dans le système judiciaire pour compléter le travail de la Cour internationale de justice; le Conseil de sécurité doit autoriser des sanctions ciblées contre ceux qui violent l'embargo sur les armes.
     
  • Trois: Une armée et une police nationales intégrées pour rétablir la sécurité. Les bailleurs de fonds devraient créer une Équipe militaire internationale consultative et d'instruction (IMATT) afin d'intégrer l'ensemble des programmes d'aide et de formation destinés aux nouvelles forces de sécurité; l'aide destinée aux réformes du système de sécurité doit être augmentée; un groupe de travail devrait être établit afin de coordonner le soutien au développement de la police.
     
  • Quatre: Le désarmement, la démobilisation et le rapatriement des FDLR. Tous les moyens pacifiques susceptibles de convaincre les FDLR de rentrer au Rwanda doivent être épuisés; Kigali se doit de préciser quels sont les officiers que la Rwanda compte poursuivre en justice pour génocide et offrir davantage d'incitants aux retour des autres; un suivi international du processus de rapatriement; des sanctions ciblées du Conseil de sécurité à l'encontre des dirigeants intransigeants, particulièrement ceux vivant en Europe; parallèlement, la MONUC doit prendre l'initiative de la préparation d'une action militaire conjointe contre les FDLR.
     
  • Cinq: La mise en oeuvre du mandat de la MONUC visant à protéger les civils. Le Conseil de sécurité de l'ONU doit autoriser l'augmentation des troupes de la MONUC; l'UE et les autres bailleurs de fonds doivent lui donner un meilleur accès aux renseignements dont ils disposent; le mandat de la MONUC doit être formellement renforcé ou son concept d'opérations clarifié afin d'assurer d'une action plus vigoureuse et proactive contre les FDLR ainsi que les autres groupes armés.

Nairobi/Bruxelles, le 19 octobre 2005

I. Overview

More than two years into the transition in the Democratic Republic of the Congo, the peace process remains at risk. As many as 1,000 people a day still die from war-related causes -- mainly disease and malnutrition, but also continuing violence. While the main belligerent leaders are all in the transitional government, their corruption and mismanagement threaten stability during and after the forthcoming national elections, now postponed from June 2005 to March 2006. The international community needs to maintain pressure on a wide front, making specific security sector reform, transitional justice and good governance measures prerequisites for the elections, not allowing them to be postponed until there is a new government.

The 2002 Global and All-Inclusive Agreement created the present transitional government out of the main domestic warring parties and committed it to a plan for reunification of the country, disarmament and integration of armed groups, and elections. Some progress has been made. The parliament has passed a draft constitution (though it faces an uncertain referendum in November) and laws on citizenship, the national army and political parties. The former belligerents have begun to merge their separate administrative structures and armed groups. But the process with respect to reform of the security sector, as well as the judiciary and local administration, is far from complete.

The main reason for the impasse, including postponement of elections, has been the reluctance of the former belligerents to give up power and assets for the national good. All have maintained parallel command structures in the army, the local administration and the intelligence services. Extensive embezzlement has resulted in inadequate and irregular payment of civil servants and soldiers, making the state itself perhaps the largest security threat to the Congolese people.

State weakness also allows armed groups in the east to continue to abuse civilians. The Rwandan Hutu insurgent group, the Democratic Forces for the Liberation of Rwanda (FDLR), has refused to honour its March 2005 pledge to return home peacefully and has committed several massacres. In northern Katanga, Mai-Mai groups have fought each other and the Congolese army, displacing over 280,000 people in the province. And in Ituri, despite some robust actions by the UN Mission in the Democratic Republic of the Congo (MONUC), 4,000 to 5,000 combatants still regularly attack the local population, international troops and humanitarian officials.

The coming year will be decisive for the Congo, one of Africa's largest and potentially richest countries. A successful transition is by no means guaranteed. Unfortunately it is quite possible that political leaders will continue to block critical transitional reforms and try to skew the elections in their favour. There are reasonable grounds for fearing electoral manipulation and even a relapse into mass violence that would put at severe risk both the unity of the Congo and the stability of much of the continent.

If these dangers are to be avoided, the UN Security Council and other key members of the international community must press the transitional government to take comprehensive action to stop the suffering of the Congolese people, and ensure the success of the transition by June 2006. This briefing spells out a comprehensive action plan, built around five critical objectives, with the following major elements:

  • One: free and fair elections. The parliament must pass key electoral laws; President Kabila must keep his commitment to appoint new local administrations that fairly reflect the power-sharing agreement signed in Pretoria in 2002; and the international community must set up an effective system for monitoring the elections anticipated in March 2006.
     
  • Two: good governance and justice. A joint donors/ Congolese mechanism should be implemented to curb state corruption; donor aid should be tied to specific progress on good governance and strengthening Congolese institutions, in particular the judiciary and parliamentary commissions; a specialised human rights chamber should be established within the court system to supplement the work of the International Criminal Court (ICC); and the Security Council should enact targeted sanctions against the violators of the arms embargo.
     
  • Three: an integrated national army and police force to establish security. Donors should create an International Military Assistance and Training Team (IMATT) to integrate all aid and training for the new security forces; assistance for security sector reform should be increased and a working group established to coordinate support for police development.
     
  • Four: disarmament, demobilisation and repatriation of the FDLR. Peaceful efforts to entice the FDLR home must be exhausted, with Rwanda clarifying which officers it intends to prosecute for genocide and offering more generous incentives for others to return; there should be international monitoring of the return process and targeted Security Council sanctions against hard-line leaders, especially those in Europe. In parallel, there should be preparation for, and commencement of, military pressure on the FDLR, with MONUC taking the initial lead.
     
  • ​​​​​​​Five: fulfilment of MONUC's mandate to protect civilians. The UN Security Council needs to authorise more troops for MONUC; the EU and other donors should give it greater access to intelligence assets; and either MONUC's mandate should be formally strengthened or its concept of operations should be clarified to ensure that it acts more robustly and proactively against the FDLR and other armed groups.

Kampala/Brussels, 23 June 2005

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