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Temps Couvert sur Sun City : La Refondation Nécessaire du Processus de Paix Congolais

L’accord partiel conclu à Sun City entre le Mouvement pour la libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba et le gouvernement de Joseph Kabila, le 19 avril 2002, à l’issue de sept semaines de négociations à Sun City, représente la fin du dialogue intercongolais tel que conçu par les accords de Lusaka. 

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Synthèse

L’accord partiel conclu à Sun City entre le Mouvement pour la libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba et le gouvernement de Joseph Kabila, le 19 avril 2002, à l’issue de sept semaines de négociations à Sun City, représente la fin du dialogue intercongolais tel que conçu par les accords de Lusaka. Il ne doit cependant pas laisser place à la confusion. La négociation n’est pas finie et l’avenir de la RDC reste incertain.

Cet accord, rejoint par la grande majorité des délégués de l’opposition politique non-armée et de la société civile et approuvé par l’Angola, l’Ouganda et le Zimbabwe, reflète un début de recomposition des alliances, notamment la fin de la coalition anti-Kabila et l’isolement du Rassemblement congolais pour la Démocratie (RCD) et celui de son allié, le Rwanda. Le gouvernement Kabila et le MLC ont conclu cet accord par défaut, devant l’inflexibilité des positions du RCD sur la question de partage du pouvoir à Kinshasa et, en toile de fond, l’échec des négociations entre les gouvernements de la RDC et du Rwanda sur le désarmement des rebelles Hutu de l’Armée pour la libération du Rwanda (ALiR)[fn]Voir ICG Rapport Afrique n°38, 14 December 2001: « Disarmament in the Congo: Jump-starting DDRRR to prevent further war ».Hide Footnote . Il transforme la négociation entre les signataires de l’accord de Lusaka en une négociation bilatérale, avec d’un côté un axe Kabila-Bemba renforcés et soutenus par la communauté internationale, et de l’autre un RCD politiquement fragilisé et soutenu par un Rwanda militairement fort. Les nouveaux partenaires annoncent qu’ils mettront en place un gouvernement de transition pour le 15 juin, déclarent la mort de l’accord de Lusaka mais prétendent vouloir continuer la négociation avec le RCD et directement avec le Rwanda. Le RCD, menacé dans son existence et sa cohésion, a d’abord cherché à rompre cet isolement par une alliance avec l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) d’Etienne Tshisekedi et agite maintenant l’option d’une reprise des hostilités ou d’une partition consommée du pays.

Il est important que la négociation avec le RCD soit finalisée avant la mise en place du gouvernement de transition. Le président Mbeki, en tant que futur président de la Southern Africa Development Community et de l’Union Africaine, pourrait en prendre la co-responsabilité, sans toutefois réunir les Congolais selon le format du dialogue, et à la condition qu’il reçoive un mandat clair des protagonistes de la négociation et des pays de la région qui ont donné leur soutien au partenariat Kabila-Bemba- c’est à dire l’Angola et l’Ouganda. La neutralité de l’Afrique du sud est en effet remise en question par les Congolais, échaudés par un positionnement sud-africain ostensiblement favorable au RCD pendant Sun City.

Le tournant de Sun City pourrait aussi marquer le début d’une véritable négociation entre pays de la région sur les questions sécuritaires et économiques au cœur du conflit congolais. En particulier, le moment est venu de parler de la sécurité immédiate du Rwanda, c’est à dire du désarmement des milices hutu rwandaises présentes sur le territoire de la RDC, mais aussi de la sécurité du Congo, c’est à dire du retrait des troupes de l’Armée patriotique rwandaise (APR) de ce même territoire, les deux autres volets de l’accord de Lusaka. Il est aussi temps de parler de la sécurité à long terme pour la région, c’est à dire de la reconstruction d’un Etat au Congo et des droits et devoirs de souveraineté de cet Etat.

La coordination de ces différents aspects du processus de paix, indispensable dès qu’un accord politique de partage du pouvoir sera trouvé, pourrait être assurée par un envoyé spécial de haute stature du Secrétaire général des Nations unies. Son mandat serait de superviser l’application d’un accord inclusif pour la transition politique ; de mener à bien les négociations politiques sur la question des groupes armés ; d’assurer la coordination entre les différentes institutions des Nations unies impliquées dans la résolution des conflits rwandais et congolais (TPIR, MONUC, panel des experts sur l’exploitation illégale des ressources naturelles en RDC) ; d’établir l’architecture et le cahier des charges d’une conférence régionale permanente pour la paix et la sécurité dans les Grands lacs, concluant l’établissement de pactes de non-agression entre le Congo et ses voisins.

Bruxelles/ Nairobi, 14 mai 2002.

Executive Summary

After seven weeks of negotiations at Sun City, a partial agreement was reached on 19 April 2002 between Jean-Pierre Bemba’s MLC (Mouvement pour la libération du Congo) and the government  of Joseph Kabila. The agreement represents  the end of the Inter-Congolese Dialogue in the context of the Lusaka peace accords. However confusion reigns. The negotiations are not complete and the future of the Democratic Republic of Congo remains uncertain.

The accord, struck by the majority of delegates from unarmed opposition groups and civil society, and approved by Angola, Uganda and Zimbabwe, is the beginning of a political realignment in the DRC conflict. Most notably it heralds the end of the anti-Kabila coalition and confirms the isolation of the RCD (Rassemblement congolais pour la Démocratie) and its ally Rwanda. The Kabila government and the MLC actually concluded the accord by default, due to the intransigence of the RCD on the question of power sharing in  Kinshasa, and, in the background, the failed negotiations between the governments of the DRC and Rwanda over the disarmament of the Hutu rebels known as ALiR (Armée pour la libération  du Rwanda). This accord transformed the discussions between the Lusaka signatories into a bilateral negotiation with a Kabila-Bemba axis backed by the international community on one  side, and a politically weak RCD, backed by a militarily strong Rwanda on the other.

The new partners announced that they would  install a transition government in Kinshasa on 15 June, declared the Lusaka accords ‘dead’ but committed  themselves  to  continuing negotiations with the RCD and Rwanda. The RCD, its cohesion and existence threatened, tried to break its isolation by forming an alliance with the UDPS (Union pour la démocratie et le progrès social) of Etienne Tshisekedi, and is talking up threats of renewed hostilities and partition of the country.

It is highly desirable that negotiations with the RCD be finalised before the transition government is installed. President Mbeki of South Africa, as next president of the Southern Africa Development Community (SADC) and of the African Union (AU), should become joint leader of the process,  on condition that he receives a clear mandate from the parties to the dialogue and from the regional countries that have given their support to the Kabila-Bemba partnership, i.e. Angola and  Uganda. The neutrality of South Africa has indeed been questioned by the Congolese who were stung by its apparent support for the RCD at Sun City.

The Sun City talks may also mark the beginning of a real regional discussion on the security and economic issues at the heart of the Congolese conflict. In particular, the issue of Rwanda’s security is finally on the table – the disarmament of the Rwanda Hutu militias based in the DRC – as well as the issue of the Congo’s security – the withdrawal of the RPA (Rwandan Patriotic Army) from the DRC itself. These are both part of the Lusaka accords. It is also time to discuss the long- term security of the region, especially the reconstruction of the Congolese state, and the  rights and responsibilities of that state.

As soon as a political accord on power sharing is reached, the indispensable coordination of all these different dimensions of the peace process should be assured by the appointment of a high-profile Special Envoy of the United Nations’ Secretary- General. The mandate of the Special Envoy should be to supervise the implementation of an inclusive agreement on political transition; to coordinate UN activities on DDRRR (disarmament, demobilisation, repatriation, reintegration, and resettlement of armed groups); to ensure cooperation between the various UN institutions involved in the Rwandan and Congolese peace processes (ICTR, MONUC, the expert panel on the illegal exploitation of natural resources in the DRC); and to prepare the agenda for a regional conference on security and sustainable development in the Great Lakes.

Brussels/Nairobi, 14 May 2002

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