Briefing / Asia 2 minutes

Indonésie : comment le GAM a triomphé à Aceh

Lors des élections locales organisées à Aceh le 11 décembre 2006, nombre étaient ceux (Crisis Group y compris) qui considéraient que les candidats du Mouvement de libération d’Aceh (Gerakan Aceh Merdeka ou GAM) étaient mal partis pour obtenir de bons résultats.

Synthèse

Lors des élections locales organisées à Aceh le 11 décembre 2006, nombre étaient ceux (Crisis Group y compris) qui considéraient que les candidats du Mouvement de libération d’Aceh (Gerakan Aceh Merdeka ou GAM) étaient mal partis pour obtenir de bons résultats. On pouvait s’attendre à ce qu’ils remportent deux ou trois des dix-neuf districts à la clé mais le véritable enjeu des élections, le gouvernorat de la province, était presque sans aucun doute hors de portée. Les partis bien établis de Jakarta pouvaient quant à eux compter sur des financements importants, sur des structures bien ancrées et sur une division entre les chefs de l’insurrection. Les sondages réalisés juste avant le début de la campagne officielle donnaient la liste du GAM pour les postes de gouverneur et de gouverneur-adjoint (Irwandi Yusuf et Muhammad Nazar) quasiment hors compétition. Pourtant, le GAM a remporté une victoire écrasante, qu’un analyste évoquait comme “tombant à point nommé entre les retombées de l’accord de paix et l’échec des autres partis politiques à comprendre les nouvelles réalités du pays”. Le défi qui se pose à présent est celui de gouverner dans les règles et de manière efficace face aux attentes élevées de la population, à l’éventuel obstructionnisme d’une vieille élite et au sentiment de certains membres du GAM qui estiment que leur tour est venu d’accéder au pouvoir et aux richesses.

En compétition avec sept autres listes, Irwandi et Nazar ont obtenu 38,2 pour cent des votes, plus du double du score obtenu par leurs plus proches rivaux. Ils l’ont emporté dans quinze des dix-neuf districts en jeu, non seulement dans les fiefs du GAM sur la côte est mais aussi dans les régions où l’ethnie acehnaise n’est même pas majoritaire, comme à Simeulue, une île au large de la côte ouest, à Gayo Lues ou Aceh Sud-Est. À Aceh Sud, face à une machine bien rodée, ils ont remporté 62 pour cent des votes. Le GAM a également fait beaucoup mieux qu’espéré au niveau des districts, en enlevant six au premier tour et un autre lors du second tour, avec parfois une avance extraordinaire. À Aceh Nord, sa liste pour les sièges de bupati (chef de district) et bupati-adjoint a remporté 67 pour cent des votes. Lors du deuxième tour à Aceh Ouest début mars 2007, le GAM a obtenu le score remarquable de 76,2 pour cent.

Comment le GAM a-t-il réussi ce tour de force, d’autant plus qu’il ne disposait que de ressources limitées dans un pays où l’argent semble pouvoir tout acheter ? Au niveau provincial, il a bénéficié de la profonde insatisfaction envers les anciens partis et leurs candidats, considérés comme servant les seuls intérêts de l’élite. Dans les districts, en revanche, les élections ont mis en lumière l’efficacité du réseau d’anciens combattants et de partisans du GAM, qui a mené aux urnes les électeurs par le biais d’une armée de volontaires, par des appels à l’identité acehnaise, en insistant sur les zones pauvres et marginalisées que les partis dominants ont ignorées et, dans certains cas (mais probablement pas assez pour expliquer de tels résultats), par l’intimidation. De nombreux acehnais ont estimé qu’il était indispensable de maintenir la dynamique initiée par le processus de paix et que voter pour le GAM était un moyen à leur disposition pour agir en ce sens.

Jakarta/Bruxelles, 22 mars 2007

I. Overview

When local elections were held in Aceh on 11 December 2006, conventional wisdom (shared by Crisis Group) was that candidates from the Free Aceh Movement (Gerakan Aceh Merdeka, GAM) would not do well. They might pick up two or three of the nineteen district races, but the biggest prize – the provincial governorship – was almost certainly out of reach. The old Jakarta-linked parties would benefit from deep pockets, established structures and a split in the former insurgency’s leadership. Polls just before formal campaigning began showed GAM’s governor/deputy governor slate – Irwandi Yusuf and Muhammad Nazar – virtually out of contention. But GAM won overwhelmingly, in what an analyst called “a perfect storm between the fallout from the peace accord and the failure of political parties to understand the changing times”. The challenge now is to govern effectively and cleanly in the face of high expectations, possible old elite obstructionism and some GAM members’ sense of entitlement that it is their turn for power and wealth.

Against seven other slates, Irwandi and Nazar polled 38.2 per cent, more than double their closest competitors. They carried fifteen of the nineteen districts, not only GAM strongholds along the east coast but also areas not even ethnically Acehnese such as Simeulue, an island off the west coast; Gayo Lues; and South East Aceh. In South Aceh, against an entrenched machine, they polled 62 per cent. GAM also did far better than expected in the district races, winning six in the first round and one in a run-off, sometimes by extraordinary margins. In North Aceh, its slate for bupati (district head) and deputy bupati took 67 per cent. In the West Aceh run-off in early March 2007, the GAM team scored a remarkable 76.2 per cent.

How did they do it, especially with so few resources in a country where money seems to buy everything? At the provincial level GAM benefited from deep dissatisfaction with the old parties and their candidates, who were seen as serving the interests of a narrow elite. The district elections, however, demonstrated the effectiveness of GAM’s network of former combatants and supporters, who got out the vote through an army of volunteer workers, appeals to Acehnese identity, a focus on poor and marginal areas that established parties ignored, and in some cases – but probably not enough to make a difference to the outcome – intimidation. Many Acehnese saw maintaining the momentum of the peace process as crucial and voting for GAM a way to guarantee it.

This briefing is based on extensive interviews with all the major players and others involved in the campaign.

Jakarta/Brussels, 22 March 2007

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