Report / Europe & Central Asia 3 minutes

La résolution des conflits dans le sud Caucase: Le rôle de l’UE

L’instabilité qui frappe le Sud Caucase est une menace pour la sécurité de l’Union européenne (UE). Étant donné sa proximité géographique, ses ressources énergétiques, le tracé des pipelines et les défis que posent le trafic et le crime international à partir de cette région, il est dans l’intérêt de l’UE d’en assurer la stabilité. Les conflits non résolus qui affectent le Haut-Karabagh, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud pourraient évoluer en des guerres ouvertes dans le voisinage de l’Europe.

Synthèse

L’instabilité qui frappe le Sud Caucase est une menace pour la sécurité de l’Union européenne (UE). Étant donné sa proximité géographique, ses ressources énergétiques, le tracé des pipelines et les défis que posent le trafic et le crime international à partir de cette région, il est dans l’intérêt de l’UE d’en assurer la stabilité. Les conflits non résolus qui affectent le Haut-Karabagh, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud pourraient évoluer en des guerres ouvertes dans le voisinage de l’Europe. L’UE devrait s’engager dans la résolution de ces conflits car il en va de sa propre sécurité. Elle pourrait le faire en renforçant l’aspect résolution des conflits des instruments dont elle dispose. Puisqu’il est improbable que l’UE propose le statut de membres à la Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan, elle doit imaginer d’autres moyens d’imposer une conditionnalité à son aide et d’utiliser son influence. Un défi auquel Bruxelles commence à faire face.

Depuis 2003, l’UE étoffe son rôle en matière de sécurité dans le Sud Caucase, particulièrement en Géorgie. Elle a nommé un Représentant spécial pour le Sud Caucase, lancé une mission de la PESD (Politique européenne de sécurité et de défense) et utilisé le Mécanisme de réaction rapide de la Commission pour appuyer le  processus de démocratisation après la « révolution rose » géorgienne. L’UE a inclus l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Géorgie dans sa Politique européenne de voisinage (PEV) et initié des négociations sur un Plan d’action qui devraient se conclure à la mi-2006. La Commission a alloué quelque 32 millions d’euros à des programmes de développement économique en Géorgie et travaille en étroite coopération avec l’ONU et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). 

Cependant, l’UE pourrait accroître ses efforts pour aider à la résolution des conflits dans la région, notamment par le biais des Plans d’action en cours de négociation avec chacun des trois pays en question. Pour l’UE, ces Plans d’action sont une chance de se repositionner et de se mettre en valeur dans le Sud Caucase. Pour ce faire, ils doivent impliquer la résolution des conflits et prévoir des niveaux de référence en matière de démocratisation, gouvernance et droits de l’homme. Pour la région, ils pourraient être l’occasion de dessiner les grandes lignes de leurs réformes. Mais le chemin est encore long. Les relations de l’UE avec l’Arménie ne sont pas solides et elles le sont encore moins avec l’Azerbaïdjan. Elle ne participe pas directement aux négociations sur le Haut-Karabagh, l’Abkhazie ou l’Ossétie du Sud. Que ce soit au Haut-Karabagh ou dans la région avoisinante, l’UE n’a pas fait beaucoup d’efforts en matière de résolution des conflits. Elle n’a que rarement évoqué les conflits du Sud Caucase lors des discussions de haut niveau avec ses partenaires et a rarement utilisé sanctions et incitations pour faire progresser la paix.

Si elle souhaite devenir plus efficace, l’UE doit améliorer sa visibilité politique. Comparé à celui de la Russie, des États-Unis ou de l’OSCE, son engagement financier et politique dans la région semble minimal. Toutefois, à mesure qu’elle apporte son aide par des instruments anciens et nouveaux, la capacité de l’UE à proposer des incitations et appliquer une conditionnalité devrait augmenter. À la différence d’autres acteurs, l’UE a une valeur ajoutée à offrir grâce à son image de « partenaire honnête » et non soumis aux traditionnelles rivalités États-Unis/Russie, à la gamme d’outils dont elle dispose, de la diplomatie (soft power) aux sanctions/incitations (hard power), et à l’attrait d’une plus grande intégration européenne.

L’arrivée d’un nouveau Représentant spécial (RSUE) offre une bonne occasion à l’UE de renforcer sa présence politique dans le Sud Caucase. Le RSUE devrait chercher à devenir un observateur dans les forums relatifs aux trois conflits de la région. En Ossétie du Sud et en Abkhazie, auxquelles la Commission a déjà attribué un financement considérable, une assistance efficace et bien ciblée peut donner du poids et de la crédibilité aux efforts diplomatiques et politiques de l’UE.

En ce qui concerne le Haut-Karabagh, plutôt que d’attendre un accord sur les principes d’une résolution grâce à la médiation du groupe de Minsk de l’OSCE, l’UE devrait d’urgence planifier son assistance à la paix. L’envoi de missions d’évaluation civile et militaire dans la région pourrait donner un nouvel élan au processus de négociation, qui semble ralentir dangereusement. Qu’un accord de paix soit finalement signé ou non, l’UE devrait se préparer à mettre en œuvre des programmes visant à instaurer la confiance ou, dans le pire des cas, envisager une gamme d’options dans l’éventualité d’un regain de violence. Autrement, que la guerre ou la paix l’emporte, il sera difficile à l’UE de rattraper son retard envers les pays de son voisinage alors qu’elle est restée en dehors du Haut-Karabagh et des districts occupés voisins pendant plus d’une décennie.

Tbilissi/Bruxelles, 20 mars 2006

Executive Summary

Instability in the South Caucasus is a threat to European Union (EU) security. Geographic proximity, energy resources, pipelines and the challenges of international crime and trafficking make stability in the region a clear EU interest. Yet, the unresolved Nagorno-Karabakh, Abkhazian and South Ossetian conflicts have the potential to ignite into full-fledged wars in Europe’s neighbourhood. To guarantee its own security, the EU should become more engaged in efforts to resolve the three disputes. It can do so by strengthening the conflict resolution dimension of the instruments it applies. As the EU is unlikely to offer membership to Georgia, Armenia and Azerbaijan even in the medium term, it must identify innovative means to impose conditionality on its aid and demonstrate influence. This is a challenge that Brussels has only begun to address.

Since 2003 the EU has become more of a security actor in the South Caucasus, particularly in Georgia. It has appointed a Special Representative for the South Caucasus, launched a European Security and Defence Policy (ESDP) mission, and employed the Commission’s Rapid Reaction Mechanism to support post “Rose Revolution” democratisation processes. It has included Armenia, Azerbaijan and Georgia in the European Neighbourhood Policy (ENP) and started Action Plan negotiations due to end mid-2006. The Commission has allocated some €32 million for economic development confidence building programs in Georgia, and it has cooperated closely with the UN and the Organization for Security and Cooperation in Europe (OSCE).

Nevertheless, the EU can do more to help resolve conflict in the region, in particular through the Action Plans currently being negotiated with each country. For the EU, these are a chance to enhance and reposition itself in the South Caucasus if they can be tied to conflict resolution and include specific democratisation, governance and human rights benchmarks. For the region they may be an opportunity to map out the reform process concretely. But there is a long way to go. The EU’s relations are not strong with either Azerbaijan or, to a lesser extent, Armenia. It does not participate directly in negotiations on Nagorno-Karabakh, Abkhazia or South Ossetia. In and around Nagorno-Karabakh, it has done little for conflict resolution. It has rarely raised the South Caucasus conflicts in its high-level discussions with partners and has employed few sanctions or incentives to advance peace.

To become more effective, the EU must increase its political visibility. Compared with Russia, the U.S., the UN and the OSCE, its financial and political engagement in the region has been minimal. However, as it gives more aid through new and old instruments, its ability to provide incentives and apply conditionality should grow. Compared with other actors, the EU can offer added value, with its image as an “honest broker” free from traditional US/Russia rivalries; access to a range of soft and hard-power tools; and the lure of greater integration into Europe.

The arrival of a new Special Representative (EUSR) is an opportune moment for the EU to strengthen its political presence. The EUSR should try to become an observer in the three conflict negotiation forums. In South Ossetia and Abkhazia, where the Commission has already allocated significant funding, efficient and well-targeted assistance can give weight and credibility to the EU’s diplomatic and political efforts.

In Nagorno-Karabakh, rather then wait for an agreement on the principles of resolution mediated by the OSCE Minsk Group, the EU should begin contingency planning to assist peace implementation now. Sending military and civilian assessment missions to the region could give new impetus to a negotiation process which seems to be dangerously running out of steam. Whether or not a peace agreement is eventually signed, the EU should be prepared to implement confidence building programs or – in a worst case – to consider a range of options in case of an outbreak of fighting. Otherwise, having remained out of Nagorno-Karabakh and the adjacent occupied districts for over a decade, either war or peace will find it struggling to catch up in its own neighbourhood.

Tbilisi/Brussels, 20 March 2006

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