Briefing / Latin America & Caribbean 2 minutes

La transition en Haïti: Sur le fil du rasoir

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Résumé

Près d'un an après le départ soudain de l'ancien Président Aristide, la situation politique, sécuritaire et socio-économique demeure en crise[fn]A propos de la chute d'Aristide et des premiers mois du gouvernement de transition, voir Rapport Crisis Group Amérique Latine/Caraïbes N°10, Une nouvelle chance pour Haïti? 18 novembre 2004.Hide Footnote . Le gouvernement de transition est faible et lutte pour maintenir sa crédibilité, et aucun signe clair de réconciliation politique ou de reconstruction économique n’apparaît à l'horizon. La violence (politique et criminelle) est toujours extrêmement élevée. La crise politique, les violations des Droits de l'Homme (parfois commises par des éléments douteux de la Police Nationale d'Haïti, PNH) et les détentions illégales de certains partisans d'Aristide entravent l'initiative de dialogue national endossée conjointement par le gouvernement de transition et la communauté internationale. Il est peu probable que les élections fixées fin 2005 engendrent le gouvernement légitime dont le pays a besoin sans des progrès significatifs sur les trois principaux fronts suivants:

  • Sécurité: la Mission des Nations Unies de Stabilisation en Haïti (MINUSTAH) et le gouvernement transitoire doivent enrayer l'insécurité permanente dans laquelle vivent les citoyens, que ce soit dans les provinces où les ex-militaires opèrent toujours armés et dans les bidonvilles où des gangs armés identifiés principalement mais pas exclusivement au parti d'Aristide, Fanmi Lavalas[fn]Par la suite, nous utiliserons Lavalas.Hide Footnote , s'affrontent pour l'argent, le pouvoir et le contrôle du terrain.
     
  • Réconciliation: un dialogue national pluraliste fixant des objectifs communs pour le prochain gouvernement, indépendamment de qui remportera les élections, est nécessaire afin d'extraire Haïti du jeu politique stérile qui semble resurgir.
     
  • Reprise économique et soulagement social: alors que le gouvernement de transition a stabilisé la situation macroéconomique, l'écrasante majorité des citoyens vit dans la pauvreté, sans travail, avec des besoins alimentaires, sanitaires et une soif de justice, tandis que la frustration gagne du terrain.

La situation sécuritaire demeure précaire car les groupes armés sont loin d'être démantelés, quoique la MINUSTAH ait commencé à adopter une approche plus musclée en affrontant certains gangs dans l'un des plus gros bidonvilles de la capitale, délogeant les ex-militaires qui avaient occupé la résidence abandonnée d'Aristide, ainsi qu'en réagissant rapidement à la riposte des anciens soldats consistant à occuper plusieurs postes de police à travers le pays. Certes la mise en place d'un système national de justice et d'application de la loi efficace et impartiale constitue une priorité absolue; cependant à court et moyen terme seule la MINUSTAH semble en mesure de garantir la sécurité.

Le premier trimestre 2005 est décisif pour la transition. Afin d'éviter de nouveaux troubles, le gouvernement du Premier ministre Latortue doit de toute urgence, avec le soutien international, oeuvrer à l’établissement de l'Etat de droit et à l’amélioration des conditions socio-économiques. Les salaires et le financement du réseau électrique ont absorbé la majeure partie du budget de soutien attribué par les bailleurs, et le gouvernement demande légitimement une accélération du déblocage des fonds promis.

 Un processus inclusif de dialogue national, destiné à parvenir à un pacte entre tous les Haïtiens et susceptible d'établir les priorités nationales qu'adopterait ensuite un gouvernement élu, devrait être lancé. Il s'agit d'inclure non seulement ceux qui ont contraint le précédent gouvernement à quitter le pouvoir mais aussi ceux qui, à un moment donné, l'ont soutenu. Par ses actions, le Président Aristide a renoncé à son aspiration d'être le porte-parole des déshérités d'Haïti; toutefois ces derniers ont toujours besoin d'une voix, et certains croient encore en lui. Ce qu'il reste de son mouvement Lavalas doit prendre part à un dialogue où les participants s'engagent à rejeter la violence.

La mise en place de mécanismes appropriés est nécessaire afin de parvenir à un processus politique inclusif et préservé du risque d’enquêtes partisanes menées à l'encontre des responsables Lavalas. En l'absence de garde-fous, les élections seront probablement affectées par la violence et conduites dans un climat délétère qui risque de remettre en question leur légitimité. Haïti a déjà connu des élections qui étaient ni libres ni équitables. Il en a résulté des années d'agitation. Toutes les parties concernées doivent pouvoir faire campagne sans crainte et les citoyens voter sans être intimidés. Avec l’aide internationale, il faudra compter tous les bulletins de vote afin de rendre compte des résultats avec exactitude. Seulement alors, les élections de 2005 placeront Haïti sur de nouveaux rails prometteurs.

​​​​​​​Port-au-Prince/Bruxelles, 8 février 2005

I. Overview

Almost a year after the abrupt departure of former President Aristide, the political, security and social-economic situation in Haiti remains in crisis.[fn]For discussion of the fall of Aristide and the first months of the transitional government, see Crisis Group Latin America/Caribbean Report N°10, A New Chance for Haiti?, 18 November 2004.Hide Footnote The transitional government is weak and fighting to maintain credibility, and there are no clear signs of either political reconciliation or economic reconstruction. Violence -- criminal, score settling and political -- is still extremely high. The initiative for a national dialogue jointly endorsed by the transitional government and the international community is hindered by political polarisation, human rights abuses (some by rogue elements of the Haitian National Police, HNP), and illegal detentions of Aristide supporters. The elections planned for late 2005 are unlikely to produce the legitimate government the country needs without significant improvements in three main areas:

  • Security: the United Nations Stabilisation Mission in Haiti (MINUSTAH) and the transitional government must address continuing citizen insecurity, both in the countryside where former military still operate with weapons and in the urban slums where armed gangs identified mostly but not exclusively with Aristide's party, Fanmi Lavalas,[fn]Hereafter referred to as Lavalas.Hide Footnote  vie for turf, money and power.
     
  • Reconciliation: a pluralistic national dialogue that establishes some common objectives for the next government, regardless who wins the elections, is needed to turn Haiti away from the zero sum power game that appears to be operating again.
     
  • Economic revival and social alleviation: while the transitional government has stabilised the macro-economic situation, the overwhelming majority of citizens live in poverty, need jobs, food, health and justice, and frustration is building.

Security remains fragile because the armed groups are far from dismantled, although MINUSTAH has begun to take a more robust approach, routing some of the gangs in one of the biggest slums of the capital, removing the ex-military who had occupied Aristide's abandoned residence, and reacting promptly when the ex-military retaliated by occupying several police stations around the country. Producing effective and impartial national law enforcement and justice systems is an absolute priority, but in the near and medium term only MINUSTAH can guarantee any security.

The first quarter of 2005 is crucial for the transition. If new unrest is to be avoided, Prime Minister Latortue's transitional government, with international support, must work urgently at improving rule of law and social and economic conditions. Electricity costs and salaries take up the bulk of donor budget support, and the government rightfully is requesting that more of the promised project money be made available.

An inclusive process of national dialogue should be launched, aimed at brokering a pact among all Haitians that establishes national priorities to be taken up by an elected government. This needs to include not only those who forced the departure of the previous government but also those who, at one point, were its supporters. President Aristide abandoned his claim to be a spokesman for Haiti's poor by his actions but those people still require a voice, and some still believe in him. The remnants of his Lavalas movement need to be part of a dialogue all of whose participants commit to non-violence.

Mechanisms are needed to achieve an inclusive political process untainted by politically motivated investigations of Lavalas officials. If they are not established, the elections will likely be marred by violence and carried off in a poisonous attitude that will deprive their results of legitimacy. Haiti already has known elections that were neither fair nor free. The result has been years of turmoil. All sides must be able to campaign without fear and citizens to vote without intimidation. With international help, the ballots must be counted and the results reported accurately. Only then will the 2005 elections put Haiti on a promising new path.

Port-au-Prince/Brussels, 8 February 2005

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