Boko Haram is losing ground – but will not be defeated by weapons alone
Boko Haram is losing ground – but will not be defeated by weapons alone
A photo shows a campaign signboad displayed by the ruling All Progressives Congress (APC) to show its readiness to defeat Boko Haram Islamists on assumption office, Ogun State, Nigeria, 3 July 2015. AFP PHOTO/PIUS UTOMI EKPEI
A photo shows a campaign signboad displayed by the ruling All Progressives Congress (APC) to show its readiness to defeat Boko Haram Islamists on assumption office, Ogun State, Nigeria, 3 July 2015. AFP PHOTO/PIUS UTOMI EKPEI
Briefing / Africa 20+ minutes

Boko Haram sur la défensive ?

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I. Synthese

Depuis l’élection de son nouveau président, Muhammadu Buhari, le Nigéria s’est ressaisi et ses voisins le soutiennent de manière plus tangible, notamment en opposant une réponse militaire plus puissante à Boko Haram dans les zones rurales où le groupe jihadiste demeure puissant. D’autres partenaires internationaux contribuent à l’effort contre une insurrection qui a, depuis 2009, coûté la vie à des milliers de personnes, en a déplacé des millions et s’est étendue aux autres Etats du bassin du lac Tchad, dévastant au passage les économies locales et le commerce transfrontalier. Boko Haram semble être sur la défensive, mais il est pour l’heure peu probable que le mouvement, formé de segments dispersés à travers une vaste zone (l’état du Borno à lui seul fait 92 000 kilomètres carrés) et devenu expert en attaques terroristes, puisse être éliminé dans une bataille décisive. Les Etats du bassin du lac Tchad et leurs partenaires internationaux, qui se réuniront à Abuja le 14 mai 2016 lors d’un deuxième sommet régional, doivent mettre à profit leur nouvelle entente pour aller au-delà de la coopération militaire et définir une réponse locale et régionale plus complète, sans quoi Boko Haram ou des groupes similaires resteront une menace à long terme pour tout le bassin du lac Tchad. 

En réponse à la contre-offensive régionale, Boko Haram s’est adapté aux nouvelles conditions, notamment en faisant usage de femmes et d’enfants pour commettre des attentats-suicides contre des cibles moins on non-défendues, même s’il peut parfois encore lancer de plus grosses attaques. Il demeure difficile d’établir un schéma clair de l’évolution du groupe au cours des sept dernières années, tout comme des motivations de ses dirigeants et de ses troupes. De nombreux rapports, ainsi que quelques livres, sont disponibles mais la plupart se basent sur un nombre limité de sources directes, en plus des déclarations et sermons prononcés par les dirigeants du mouvement. Le Nigéria et ses alliés auraient tout intérêt à rassembler et utiliser de manière plus efficace les renseignements obtenus auprès des combattants capturés, sympathisants et habitants des zones occupées. Les récits livrés par d’anciens otages, des militants emprisonnés et des déserteurs pourraient contribuer à évaluer la menace persistante, à mettre au point une meilleure stratégie pour maîtriser l’insurrection et, de façon plus générale, à développer une nouvelle réflexion et des options politiques plus sophistiquées pour faire face aux attaques terroristes d’autres groupes extrémistes. 

Le sommet d’Abuja représente une occasion unique pour le Nigéria, pour ses voisins du bassin du lac Tchad (le Cameroun, le Niger et le Tchad) et pour leurs partenaires internationaux, en particulier l’Union européenne (UE), les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni, de trouver des solutions à des défis majeurs. Il s’agit entre autres de : 

  • faire face à une situation humanitaire désastreuse, et notamment venir en aide aux 2,8 millions de déplacés internes et réfugiés, particulièrement en tentant de limiter ou d’atténuer les conséquences à court et moyen termes pour les communautés locales des embargos militaires sur les circuits économiques censés approvisionner Boko Haram ; 
  • garantir un retour à l’Etat de droit et mettre fin aux tactiques contre-insurrectionnelles qui exacerbent le ressentiment parmi les civils, poussent les jeunes à rejoindre les groupes armés et contribuent à s’aliéner des communautés dont le soutien est essentiel pour combattre les insurgés, que ces tactiques soient orchestrées ou simplement appuyées par l’Etat ; 
  • libérer certains des détenus accusés d’avoir soutenu Boko Haram, incarcérés sur la base de ces seuls soupçons, et rejuger les individus condamnés à l’issue de procédures ne respectant pas les droits de la défense ; 
  • préparer des canaux pour la réhabilitation des combattants de base du mouvement, qui l’ont rejoint pour des raisons diverses et souvent non-idéologiques, tout en restant ouvert à un dialogue, public ou en coulisses, avec ceux des dirigeants de Boko Haram qui seraient prêts à accepter un compromis ; 
  • réduire l’utilisation, pour combattre les insurgés, de groupes d’autodéfense qui, s’ils ne sont pas bien gérés, peuvent représenter une menace à plus long terme ; et
  • réinstaller une administration publique dans les zones périphériques marginalisées afin de leur fournir les services de base (sécurité, Etat de droit, éducation et santé) et de commencer à résoudre les problèmes qui ont poussé beaucoup d’habitants à rejoindre des mouvements tels que Boko Haram. 

Ce briefing s’appuie sur le travail antérieur de Crisis Group sur le radicalisme islamiste violent au Nigéria, sur de récentes enquêtes de terrain dans ce pays, ainsi qu’au Cameroun, au Niger et au Tchad, et sur le rapport spécial de Crisis Group intitulé Exploiter le chaos : l’Etat islamique et al-Qaeda (Exploiting Disorder: al-Qaeda and the Islamic State, la version complète est disponible en anglais), publié en mars 2016. Il inaugure une nouvelle série de publications analysant comment Boko Haram, qui était un petit mouvement de protestation dans le Nord-Est du Nigéria, s’est transformé en une menace régionale, et les réponses des Etats du bassin du lac Tchad et de leurs alliés.

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