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Nigeria : mettre fin aux troubles dans le delta du Niger

Le delta du Niger risque de plonger dans le chaos. Le 29 mai 2007, l’entrée en fonction de nouveaux gouvernements au niveau national et dans les États fédérés a fourni une occasion de résoudre le conflit qui affecte depuis longtemps cette région riche en pétrole mais fortement appauvrie.

Synthèse

Le delta du Niger risque de plonger dans le chaos. Le 29 mai 2007, l’entrée en fonction de nouveaux gouvernements au niveau national et dans les États fédérés a fourni une occasion de résoudre le conflit qui affecte depuis longtemps cette région riche en pétrole mais fortement appauvrie. Six mois plus tard, cette occasion s’éloigne au milieu des violences et de la criminalité. Le pays a besoin d’une action décisive afin de mettre fin à la violence et aux prises d’otages, d’initier des projets de développement qui donneront des résultats dès le court terme pour consolider la confiance du public envers l’administration du président Umaru Yar’Adua et de résoudre les problèmes législatifs et constitutionnels à l’origine des troubles dans la région.

Les premières déclarations et actions de Yar’Adua à son arrivée au pouvoir ont fait naître l’espoir dans le delta. Le choix de Goodluck Jonathan, qui appartient à l’ethnie Ijaw et occupait alors le poste de gouverneur de l’État de Bayelsa, en tant que colistier répondait au souhait de la population régionale d’être représentée à la présidence. Dans son discours d’investiture, Yar’Adua a identifié le delta comme l’une de sept régions prioritaires dans le pays ; il a par la suite entamé des consultations avec les organisations ethniques et militantes et a donné son aval au plan général de développement régional que son prédécesseur Olusegun Obasanjo avait lancé en mars 2007. Mais rien de tout ceci n’a encore abouti à une stratégie globale crédible susceptible de mettre fin à la violence. Les reports répétés du sommet du delta du Niger, qui devait initialement se tenir en juin, et le manque de clarté quant à la liste des participants à ce sommet ainsi que ses méthodes et objectifs ont érodé la confiance et font planer la menace d’une rechute dans un conflit encore plus intense.

Suite à l’arrestation en Angola le 3 septembre de l’un de ses dirigeants, Henry Okah, le Mouvement pour l’émancipation du delta du Niger (MEND) a repris ses attaques contre les installations pétrolières et les prises d’otages. Le 18 octobre, le MEND a menacé d’étendre sa campagne d’attentats à la bombe au-delà du delta si le gouvernement fédéral accédait à la demande de l’armée d’organiser des raids contre les camps de militants.

La prise d’otages, tactique employée par les militants depuis le début 2006 pour attirer l’attention internationale sur la crise dans le delta du Niger, est devenue une entreprise criminelle lucrative qui frappe surtout les hommes politiques locaux ainsi que leurs proches alors qu’elle se limitait initialement aux expatriés travaillant dans l’industrie pétrolière. Cette pratique a également commencé à s’étendre au-delà du cœur du delta, à l’État d’Ondo sur la frange ouest de la région et dans d’autres parties du pays.

Des affrontements en août dans l’État de Rivers entre des bandes criminelles ayant des liens politiques et des ruptures de plus en plus brutales entre les principaux groupes militants dans le delta ont aggravé la situation sécuritaire. Les divisions parmi les militants ont amenuisé les perspectives de forger un front uni pour négocier avec le gouvernement.

S’il ne veut pas manquer l’occasion de résoudre la crise qui frappe le delta, Yar’Adua doit de toute urgence aller au-delà des consultations avec les militants et les chefs ethniques qui n’ont que trop duré et traduire ses promesses en des politiques crédibles qui s’attaquent à la violence et tiennent compte des revendications légitimes. Le parlement fédéral doit apporter des solutions constitutionnelles aux revendications politiques, économiques et environnementales à l’origine des troubles ethniques et communautaires qui agitent le pays depuis des décennies. Le gouvernement de l’État de Rivers, dont le territoire a vu les violences les plus dures et les plus récentes, doit agir avec retenue pour éviter d’aggraver plus encore les relations déjà explosives entre les groupes ethniques dans cet État.

Dakar/Bruxelles, 5 décembre 2007

Executive Summary

The Niger Delta is again at risk of sliding into chaos. The 29 May 2007 inauguration of new federal and state governments offered an opportunity to resolve longstanding conflicts afflicting the oil-rich, deeply impoverished region. Six months later, the opportunity is unravelling amid new violence and criminality. Decisive action is necessary to stop militant violence and criminal hostage-taking, initiate quick-impact development projects that can build public confidence in President Umaru Yar’Adua’s administration and tackle constitutional and legal issues that have fuelled unrest in the region.

Yar’Adua’s early statements and actions raised hopes in the Delta. The selection of Goodluck Jonathan, an ethnic Ijaw and then governor of Bayelsa State, as his running mate responded to the region’s demand for representation in the presidency. Yar’Adua identified the Delta as one of seven priority areas in his inaugural address and followed up by initiating consultations with ethnic and militant organisations and endorsing the regional development master plan launched by his predecessor, Olusegun Obasanjo, in March 2007. But none of this has yet led to a comprehensive and credible strategy for ending the violence. Repeated postponements of the Niger Delta summit, initially called for June, and lack of clarity over its participants, methods and goals are eroding confidence and threatening a relapse into even more intensive conflict.

Following the 3 September arrest in Angola of one of its leaders, Henry Okah, the Movement for the Emancipation of the Niger Delta (MEND) resumed attacks on oil installations and hostage-taking. On 18 October, it threatened to extend its bombing campaign beyond the Delta if the federal government agreed to the military’s request to raid militants’ camps.

Hostage-taking, employed by militants since early 2006 to draw international attention to the Delta crisis, has turned into a lucrative, criminally driven enterprise, with local politicians and their relatives frequent victims, instead of just the oil industry expatriates who were the original targets. The practice has also begun to spread beyond the core Niger Delta, to Ondo State on the western fringe of the region and other parts of the country.

Clashes in Rivers State between politically sponsored criminal gangs in August and deepening splits within the Delta’s major militant groups have worsened the security situation. Divisions within militant ranks have reduced prospects for forging a united front to negotiate with the government.

If Yar’Adua is not to lose his opportunity to resolve the Delta crisis, he must urgently go beyond drawn-out consultations with militants and ethnic leaders and translate his promises into credible policies which address the violence and legitimate demands. The federal legislature needs to provide constitutional solutions for the political, economic and environmental grievances that have been at the roots of ethnic and communal agitation for decades. The Rivers State government, whose territory has seen the worst and most recent violence, must act with restraint to avoid aggravating the already volatile relations between ethnic groups in the state.

Dakar/Brussels, 5 December 2007

 

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