Report / Middle East & North Africa 2 minutes

L’Irak et les Kurdes : pour une résolution de la crise de Kirkouk

Jour après jour, chaque bombe qui explose dans une école ou un magasin en Irak emporte avec ses victimes un peu plus d’espoir de trouver une solution pacifique à la question de Kirkouk.

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Synthèse

Jour après jour, chaque bombe qui explose dans une école ou un magasin en Irak emporte avec ses victimes un peu plus d’espoir de trouver une solution pacifique à la question de Kirkouk. L’approche adoptée par les Kurdes, qui s’appuie sur la constitution et dont le point culminant est la tenue d’un référendum d’ici la fin de l’année, rencontre la vive opposition des autres communautés de Kirkouk – les communautés arabe et turkmène – qui y voient un processus biaisé dont le résultat est connu d’avance. Celles-ci préfèrent pour leur part maintenir Kirkouk sous le contrôle du gouvernement fédéral, une option rejetée par les Kurdes. Parce que les parties sont toutes bien campées sur leurs positions et parce que les Kurdes estiment que Kirkouk est un héritage qu’ils sont sur le point de reprendre, le débat devrait se porter sur un processus juste et acceptable pour tous et non plus se cantonner au seul résultat. Pour les Kurdes, cela implique de remettre à plus tard le référendum, de mettre en œuvre des mesures de confiance et de chercher un nouveau mécanisme qui donne la priorité au consensus. Les États-Unis doivent admettre le risque d’une explosion de violence à Kirkouk, faire pression à la fois sur les Kurdes, sur le gouvernement de Bagdad et sur la Turquie pour qu’ils ajustent leurs politiques et faciliter un règlement pacifique.

Le rôle passif que s’est choisi Washington, seul allié des Kurdes, n’a pas été d’un grand secours. Préoccupée par sa tentative de sauver l’Irak par la mise en œuvre d’un nouveau plan de sécurité à Bagdad, l’administration Bush a laissé de côté la crise de Kirkouk alors même qu’elle s’aggravait. Cette négligence pourrait s’avérer fort dommageable pour les États-Unis. Si le référendum souhaité par les Kurdes est organisé plus tard cette année en dépit des objections soulevées par les autres communautés, il est fort probable que la guerre civile s’étende à Kirkouk et à la région kurde, jusqu’à présent la seule région d’Irak qui connaisse encore calme et progrès. Par ailleurs, si le référendum est reporté sans que les Kurdes aient la possibilité de sauver la face, leurs dirigeants pourraient se retirer du gouvernement Maliki, ce qui précipiterait une crise gouvernementale à Bagdad au moment même où le plan de sécurité devrait, en théorie, donner des résultats politiques.

La communauté internationale aurait déjà dû depuis longtemps faire des efforts diplomatiques vigoureux pour régler la question de Kirkouk. Avec leurs alliés et en faisant appel à l’expertise politique et technique des Nations unies, les États-Unis devraient élaborer une stratégie alternative pour Kirkouk qui soit acceptable pour toutes les parties concernées. Étant donné la complexité de la situation régionale, cette stratégie devrait intégrer deux autres éléments cruciaux : d’une part, l’avancement de l’élaboration d’un droit sur les hydrocarbures (qui reste encore à négocier dans sa majeure partie) vers la pleine intégration de la région kurde au sein d’un Irak fédéral et, d’autre part, les inquiétudes de la Turquie concernant le PKK, mouvement de guérilla turco-kurde dont les combattants se terrent dans les montagnes du Kurdistan irakien, pour prévenir une éventuelle tentative de la part d’Ankara de jouer les trouble-fêtes.

La seule lueur d’espoir qui s’échappe de cette inquiétante confusion tient à ce que toutes les parties à Kirkouk semblent actuellement s’accorder sur le besoin de dialoguer. Ceci vaut par exemple pour les Kurdes : après avoir poursuivi résolument depuis quatre ans une stratégie qui, même si elle devait mener à l’acquisition de Kirkouk, n’offrait aucune perspective de la conserver de façon pacifique, ils ont fini par en reconnaître la futilité. Certains semblent indiquer qu’ils sont prêts à essayer une nouvelle stratégie, même s’ils continuent d’insister sur la tenue d’un référendum en 2007. La communauté internationale devrait exploiter cette ouverture et encourager les Kurdes, courtoisement mais fermement, à faire marche arrière sur la question du référendum et à accepter plutôt un processus de délibération par consensus qui pourrait générer des dividendes bien plus importants – la paix et la stabilité dans une Kirkouk partagée – que s’ils imposaient leur volonté exclusive par le biais d’un vote ethnique à la majorité simple et par l’annexion.

Kirkouk/Amman/Bruxelles, 19 avril 2007

Executive Summary

With every day and each exploding bomb that kills schoolchildren or shoppers, hopes for peaceful resolution of the Kirkuk question recede. The approach favoured by the Kurds, constitution-based steps culminating in a referendum by year’s end, is bitterly opposed by Kirkuk’s other principal communities – Arabs and Turkomans – who see it as a rigged process with predetermined outcome. Their preference, to keep Kirkuk under federal government control, is rejected by the Kurds. With all sides dug in and the Kurds believing Kirkuk is a lost heirloom they are about to regain, the debate should move off outcomes to focus on a fair and acceptable process. For the Kurds, that means postponing the referendum, implementing confidence-building measures and seeking a new mechanism prioritising consensus. The U.S. needs to recognise the risk of an explosion in Kirkuk and press the Kurds, the Baghdad government and Turkey alike to adjust policies and facilitate a peaceful settlement.

The studied bystander mode assumed by Washington, the Kurds’ sole ally, has not been helpful. Preoccupied with their attempt to save Iraq by implementing a new security plan in Baghdad, the Bush administration has left the looming Kirkuk crisis to the side. This neglect can cost the U.S. severely. If the referendum is held later this year over the objections of the other communities, the civil war is very likely to spread to Kirkuk and the Kurdish region, until now Iraq’s only area of quiet and progress. If the referendum is postponed without a viable face-saving alternative for the Kurds, their leaders may withdraw from the Maliki cabinet and thus precipitate a governmental crisis in Baghdad just when the security plan is, in theory, supposed to yield its political returns.

Vigorous international diplomatic efforts on the Kirkuk question are overdue. Along with its allies, and assisted by the UN’s political and technical expertise, the U.S. should forge an alternative strategy on Kirkuk that is acceptable to all parties. Given the complex regional situation, it will need to incorporate two additional critical elements: progress on Iraq’s hydrocarbons law (major parts of which are yet to be negotiated) to cement the Kurdish region securely within a federal Iraq; and Turkey’s concerns about the PKK, the Turkish-Kurd guerrilla group whose fighters are holed up in the mountains of Iraqi Kurdistan, in order to remove Ankara’s potential spoiler role.

If a ray of hope shines through this dismal tangle, it is that all sides in Kirkuk currently seem to agree on the need for dialogue. This includes the Kurds who, having pursued single-mindedly for four years a strategy that, even if it were to lead to the acquisition of Kirkuk, offered no prospect of holding onto it peaceably, have come to recognise its futility. Some are signalling they may be prepared to try something new, even if they continue to insist on a referendum in 2007. The international community should build on this and encourage the Kurds, with a gentle but firm nudge, to step back from the referendum and embrace instead a deliberative consensus-based process that could produce far greater dividends – peace and stability in a shared Kirkuk – than the imposition of their exclusionary rule via an ethnically-based, simple-majority vote and annexation.

Kirkuk/Amman/Brussels, 19 April 2007

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